jeudi 30 septembre 2010

J'accouchais!

On l’appelle toujours notre beau Laurent, c’est l’avantage d’être le plus vieux de la famille, ce qui indemnise un peu pour les inconvénients exigeants d’être l’aîné qui éduque ses parents afin qu’ils en deviennent de « meilleurs » au fil de la fratrie.


Il y a de cela vingt-trois ans, tee-shirt et salopette de coton, je me suis réveillée un peu lourde, voire pataude. Peut-être les trente-deux livres de surplus étaient-elles en cause, mais la température avait frôlé tout de même les vingt-six degrés la veille. Je ne peux me souvenir s’il s’agissait de couches ou d’autres articles pharmaceutiques manquants, mais je me remémore être allée tout doucement faire des courses pour terminer la « valise de départ ». J’ai pressenti que c’était le grand jour, à la quarante-et-unième semaine et demie de gestation, deux jours avant la date d’expiration déclarée par les médecins. Dire à quel point j’aimais ce bedon!

Les marchandes rencontrées au marché Jean-Talon me demandaient tout à tour quelle était le moment prévu de l’accouchement, étonnées de me revoir jour après jour. Moi, je nageais dans la béatitude telle une éléphante qui porte sa semence pendant près de deux ans. Mantras, yoga de maternité, respirations, lectures, visualisations, carrousel mélodieux au-dessus du berceau, tout baignait dans cette aura que peut engendrer la mise au monde. L’enfant céleste et sa mère étaient dans l’apothéose de la fusion, déjà surdouée de nature dans ce domaine.

J'étais inhabituellement calme. Nous sommes partis vers 16 h 30 vers Ste-Justine, afin de s’assurer qu’il s’agissait bien du « vrai » travail, car ça résonnait plus comme des « crampettes » que des contractions. Étant donné l’anxiété évidente du père, ils m’ont « gardée » et installée dans une chambre. Mon accompagnatrice (doula) et amie Ginette est débarquée dans un temps record, dotée d’une présence plus qu’apaisante. Dès cet instant, je n’ai plus vraiment été dans cet antre hospitalier, mais qu’à l’intérieur de chaque respiration, de chaque poussée qu’on me priait de retenir. Mon petit bonhomme voulait incontestablement voir le jour et réclamait sa venue, vigoureux comme un joueur de football. Le plus magnifique enfant du monde s’est déposé sur mon ventre à 21 h 20, triomphant de ses neuf livres et huit onces. Robuste détenteur de ses 10-10-10 au test d’Apgar, les infirmières étaient abasourdies de sa corpulence, bien dissimulée dans un « corps de ballerine », disaient-elles. Pourtant, à mes yeux, j’avais contre mon cœur un minuscule Bouddha!


 Mon beau Laurent, tu as grandi à travers les promenades au marché, à la campagne, les histoires de Babar, les cantates de Bach, les constructions de Lego, les premières touches sur mon clavier Mc Intosh 128 K, le collège, le football, et l’amour.
Tu enregistres désormais ton expansion dans tes études en physique, entre les labos de Mc Gill et ton nid d’amoureux. Des mutations des cellules, je ne sais ce que tu découvriras, mais tu demeureras toujours un chevalier qui sème le bonheur, la tendresse, la justice, et la générosité. Grâce à toi, j’ai perdu mes repères et étendu mes horizons en plongeant dans la vivacité de l’amour. Bon anniversaire, mon fils!

2 commentaires:

  1. Quel beau cadeau d'anniversaire pour Laurent.
    Le témoignage d'une mère aimante, d'une naissance heureuse et l'arrivé d'un Bouddha!
    Vive la vie...

    Gi

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  2. Merci pour ce beau témoignage que j'espère beaucoup de futures mamans liront.C'est donner la vie!Gros becs
    Isabelle

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