jeudi 6 mai 2010

Des chaussures et des fourmis

J’ai traversé mon premier mercredi  d’excursion créative, dans un petit café que j’affectionne particulièrement, Le petit Flore, avec mon amie Renée que j’affectionne encore plus. Heureusement que j’étais avec elle, car j’avais la sensation qu’il me manquait un « morceau ». Une espèce de crabe habitait mon estomac, semblable aux moments où je déposais les enfants à la garderie, ou pire encore, au service de garde de l’école. Pendant des années, j’avais beau me répéter que ma réaction était démesurée, que cette méthode éducative, très tendance, les rendrait autonomes et heureux, rien ne transformait cette sensation crabesque.


Toujours est-il qu’hier, à ne pas consacrer mon début de journée par l’écriture de mon blogue, je devais composer avec mon crabe. C’est bon signe, dans la mesure où le test est concluant, j’ai besoin d’écrire. Une fois le changement de zonage franchi, j’ai profité à fond la caisse du moment adoucissant qu’apporte l’ambiance d’un bistro. C’est cela qui m'a manqué cruellement pendant les années consacrées au travail et à la maternité bouffait tout l’espace, niet pour moi. La vie m’offre une reprise, voilà que je signe au bas du contrat.

J’ai donc siroté mon thé (quoiqu’en sachet) et dégusté un potage réconfortant. Nous avons échafaudé plusieurs projets, idées, rêveries, jusqu’à ce que l’appel des boutiques nous assaille. J’ai failli m’évanouir devant des chaussures de rêve, imaginé à quel point ce serait divin qu’ils soient dans mes pieds.
(Image non représentative des chaussures de la Boutique L'Épingle à linge) 
Ai résisté de tous mes orteils et de ma carte de crédit. Promis toutefois de revenir un jour ou l’autre. Heureusement, le temps me manquait. Je devais revenir à la maison à cause des fourmis.

Lorsque j’étais enfant, les fourmis représentaient la chaleur d’été, les lilliputiennes vallées de sable blanc, leur maison, leur incessant travail,  le devoir accompli. Mignonnes petites bêtes inoffensives. Aujourd’hui, à l’heure où l’on se parle, je suis sur le bord d’une crise d’hystérie, en bataille armée devant elles. Après avoir tout essayé, depuis deux années, de manière civilisée et naturelle, s’entend, l’étape des exterminateurs est venue. Nous sommes tellement hospitaliers, me dis-je, qu’elles ont élu domicile avec nous, la cuisine étant leur lieu de prédilection. Je sais que c’est aussi mon lieu préféré, que ça sent bon le pain et les mijotés, que j’adore accueillir les amis, mais pas des fourmis charpentières. La nuit, lorsque l’insomnie me conquiert, je les entends presque gruger les solives. Je sais, ce ne sont pas des termites, mais elles sont effrayantes et je décrète qu’elles doivent chausser de nouvelles chaussures et foutre le camp dehors!


Quand je pense à un éditorial rédigé il y a quelques années, dans une revue destinée aux enseignants et élèves de l’éducation des adultes, j’en suis bouche bée. Ma perception au regard des fourmis, aujourd’hui, est en transit.

Voici un extrait :

(…)Mais les fourmis m'en apprennent beaucoup sur la vie cet après-midi.


D'abord, elles travaillent en équipe. Ensuite, elles vont bon train, sans relâche. Les fourmis sont aussi des travailleuses acharnées. Elles ne font pas de prouesses vertigineuses comme les papillons, mais elles se préparent à des temps plus difficiles, même lors d'une belle journée d'été…

Soudain, j’effectue des liens avec la vie scolaire… Nous avons peur, fourmis au ventre, et nous sommes bien décidés à terminer notre secondaire 5… dans un mois! Cela ne ressemble-t-il pas aux pirouettes impressionnantes du papillon? Tout ça, dû à une grande volonté de réussir, bien sûr… (…)


Et si on se laissait guider par les fourmis…

S'entraider dans la classe, avec un esprit d'équipe et de respect…
Ne pas exiger plus des autres et de soi-même que la limite prescrite…
Maintenir un rythme soutenu, réaliste, qui nous animerait jusqu'à la fin de la session…
Beau temps, mauvais temps, la présence serait de mise…
Être reconnaissant des récoltes et remercier ceux qui y ont contribué…
Persévérer lors des intempéries…
S’offrir des gâteries de temps en temps…
Il n’y a rien à perdre, après tout!

Ironie du sort, je recevrai mon panier de fruits et légumes bio en même temps que l’équipe d’extermination assiègera ma maison. Quelle horreur! Cela ne m’empêchera nullement d’enfourner des scones aux canneberges, de préparer un risotto au saumon et petits pois verts, en plus d’un potage-surprise. Rien ne viendra à bout d’une cuisine réconfortante.

Morale de l’histoire, tout est question de focus.

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