mercredi 14 avril 2010

Les arpents verts

Depuis que j’ai appris que India Desjardins s’habille mou pour écrire, je suis déculpabilisée d’être accoutrée en jogging, cheveux mouillés retenus avec une pince. Quand on connaît cette pétillante et amusante femme, ça redore l’image des tenues intérieures pour piocher sur des textes.


Je me suis réveillée en sueurs, à l’aube, terrassée par une liste de "to do". Je n’avais plus de pain sans gluten, j’avais échoppé les huit brassées de lessive, des courriels à retourner, une formation sur l’écriture de magazine à saisir sur le Web, un texte à remettre à l’École de rédaction, blablabla. En plus, j’étais envahie par la culpabilité d’avoir bouffé du steak. Oui, oui, du steak. Je n’avais pas absorbé une telle chose depuis des siècles, mais j’ai répondu à une attaque post-pureté. Je mange des fruits et légumes bio, du poulet bio, du veau bio, du riz et des céréales sans gluten et bio, je bois des tisanes et du thé bio. J’harmonise ma santé avec des suppléments de tous ordres, des huiles essentielles jusqu’aux cures réparatrices, une programmation assez intense pour orchestrer ma journée à toute heure.

C'est pour ça que j’ai craqué. Ras-le-pompon! Nous prendrions le même repas, toute la famille, et connaîtrions un semblant de « normalité », bref, un souper plongeon vers ce qui ressemble à ce que la moyenne des gens ingurgite quotidiennement.

Quelle horreur! En premier lieu, ma fille a refusé cette chose. Mon fils a confié, de but en blanc, qu’il allait parfois le midi chez PFK, avec ses amis. QUOI????????????? Ça ne ressemblait donc pas du tout à l’idée que je m’étais faite dans mes archives cérébrales. La nuit venue, après avoir infuser des herbes digestives, j’ai fait des cauchemars pendant que jouait la neuvième symphonie de Beethoven dans mon estomac.

Un film concernant les événements des dernières semaines (visites successives à l'hôpital Sainte-Justine pour le fameux membre fracturé de mon fils, ma saga dans les canyons du centre-ville, les cures) s’est déroulé dans mon cerveau, avec une bande-annonce “give me a break” déroulant en bas des images.

J’ai recraqué. Je ne veux plus sortir de la maison, je veux m’habiller mou, et je songe à élever des poules en liberté, dans ma cour. Dans ma crise du bio, je pourrais, à défaut d'un potager, d'une serre et d'une étable, faire caqueter et glousser mes volailles, et bouffer des oeufs heureux. J'ai la prétention de croire que mes poulettes nageraient dans le bonheur, à quelques pattes de la piscine. Dans une discrète cour du 450, elles  seraient déjà dans un espace plus spacieux que dans leur milieu actuel. Par contre, je ne sais pas si mes voisins apprécieraient, ni mon conjoint, encore moins les ados, mais juste l'idée me sourit.

Moi, je m’ennuie des arpents verts. Nostalgique, je cherche un lieu, ne serait-ce que pour quelques jours, pour revivre dans la nature, le foin, avec des poules et des chèvres. Il me manque toutefois une personne pour grimper dans le poteau, afin de me “brancher” pour vous écrire. Dans ce tableau idyllique, j'imagine le meilleur: au grand dam de mon amie Édith, du country comme musique d'ambiance dans ma basse-cour.

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