mercredi 23 mars 2011

Les vertus du marinage

Sous l’égide du prélude en sol majeur – clavier bien tempéré- de J.S. Bach, je me bute une fois de plus à la conjugaison de mes passions et intérêts. Parfois, je me dis que ma personnalité est emprisonnée dans les phrases, celles-ci emmaillotées dans des bouts de textes, ceux-ci épars dans la pile de dossiers que je tente de prioriser. Un amalgame d’idées qui giclent de partout, entre un potage de courge et pommes, des cretons végé aux lentilles, la lessive, les courses, les rénos, les rendez-vous chez le dentiste, l’ostéopathe, la naturopathe, la vie de mille-pattes, quoi.


Devant cette forêt de projets littéraires, j’exerce le principe du « tas ». Le terme n’est pas très élégant, mais il ne faut pas s’y méprendre, il a ses vertus. Je ramasse tous les cahiers, les chemises d’articles de revues ou journaux, les tablettes quadrillées, lignées (chacune ayant une fonction différente), les textes imprimés, le plan d’action biffé et coloré de surligneurs roses, jaunes ou verts, c’est selon, les images inspirantes, les promotions, les « post- it » — qui ont hérité d’un mot ou d’une phrase pendant que j’étais dans le bain ou en brassant une sauce aux légumes — , et je fais une pile. Je range les plumes, stylos gel, étiquettes, pince-feuilles. C’est « place nette » sur mon bureau. Je vais m’infuser un thé et respire. J’ouvre le réfrigérateur et contemple le nettoyage à venir et soupèse l’idée du prochain repas, mon antidote à l’angoisse étant la cuisine.

Je reviens alors m’installer devant mon écran et choisis une phrase clé qui fouine au-delà du périmètre de la gestion empilée. J’hésite, je me lance, j’étoffe un peu. C’est parfois raboteux. D’autres moments ont du caractère, mais au bout d’un certain temps, si je laisse bien mariner mon cerveau et mes silences, mon doigté s’enfièvre et le bruit se transforme en son. C’est la théorie du marinage : elle change la texture et le goût, l’élève, la magnifie, malaxe les molécules, chasse l’âpreté, insuffle de la virtuosité à ce qui est. Magnifique et ostentatoire. La vitesse perd la course. La macération gagne la médaille d’or.

Et me voilà comblée. Pour un instant. Je suis nourrie jusqu’à la prochaine soif. Toutefois, on doit se prémunir d’un optimisme béat, car il faudra replonger dans la page un peu plus tard, entendre ce qui veut émerger et lui laisser un espace de jeu pour qu’il puisse aiguiller son concerto. C’est une invitation à célébrer l’attente. Risquer de mariner dans la statique temps d’une réponse, d’un choix, d’un événement, et vous serez stupéfaits des résultats.

Judith Leblanc
Analogiquement parlant, une marinade oscarisée, dénommée la marinade à Sarah.


½ t. huile de canola
½ t. huile de carthame
½ t. huile d’olive
Jus de 2 citrons
2 gousses d’ail pressées
1/3 t. Bragg (sauce soya sans sel ni gluten)

Bien mélanger et utiliser à toutes les sauces, avec du poisson ou des pâtes aux légumes!
Se conserve au frigo environ deux semaines.

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