vendredi 30 juillet 2010

À chacun sa retraite!

L’heure est à la retraite. Je désirais une capsule de temps et d’espace pour écrire, depuis le début de l’été, sans apercevoir une brèche possible. C’était ignorer la vigueur fantastique de la vie. Les circonstances se sont amalgamées pour nous offrir la bénédiction.


Ma fille de seize ans explorera le silence de l’Abbaye St-Benoît du Lac et le lever à l’aube pour entendre les chants grégoriens.
Elle et son amie, ma fille adoptive, ont été secouées par cette inspiration « à être différentes des autres de leur âge », une nuit, après avoir asséché leurs cordes vocales en discutant depuis vingt-quatre heures non stop. On ne croyait pas que ce projet — elles sont venues me l’annoncer à six heures du matin —, faisant l’effet d’un météorite atterrissant dans ma cour, verrait le jour. Déterminées plus que jamais, elles ont organisé leur réservation — et leurs parents pour le transport —, et sont déjà dans l’enceinte de l’introspection, livres et journaux intimes en main, à l’instant où j’écris. Avouons qu’elles sont uniques en leur genre!

Par la magie du destin, mes deux fils partent en voyage de pêche. Laurent organise le tout, lieu, kit de camping, la ligne de leur grand-père en prime, et je prépare la bouffe avec l’aide de William. Ce dernier a prévu l’essentiel, soit du thé glacé, des croustilles, du chocolat, des barres tendres, du pain blanc. Je m’occupe du reste, soit ce qui ressemble à un repas nutritif ET savoureux pour le samedi midi, car le poisson sera à l’ordre du jour. À trois heures de route d’ici, ils auront le temps d’élaborer une histoire dithyrambique de pêche. La nuit froide de la réserve faunique veillera sur leur silence et leur sommeil.

Je serai aussi en retraite, en compagnie féminine, qu’on a intitulée une retraite créative. Les sept chevalières de la table ronde, pendant trois journées, se consacreront à leur projet créatif respectif : peinture, écriture, conception d’atelier, lecture, danse. Les moments de retrouvailles seront enjolivés d’un bon repas ou d’une méditation, avant de retourner « dans notre chambre », le silence et l’introspection étant le créneau souhaité. Le lieu, haut perché dans la nature des Laurentides, et l’énergie conjuguée au féminin, soutiendra cette démarche.

Quant au père de cette marmaille, il bénéficiera d'un espace libre à la maison, habituellement foisonnante d'activités. Un beau bonheur se solitude pour lui aussi. 

« Appréciez la solitude. Considérez-la comme une situation privilégiée. C’est un don du ciel et la condition essentielle pour s’améliorer, traiter de sujets sérieux ou bien travailler. Les moments de solitude sont faits pour planter des graines qui pousseront et s’épanouiront sur l’inconnu, sur des parties encore non découvertes de la vie. (…) Il y a tant de choses que nous ne pouvons réaliser que dans le silence et dans la solitude! Méditer, lire, rêver, imaginer, créer, se soigner… » Dominique Loreau, L’art de la simplicité

Et si vous croyez n’avoir rien à créer, si vous reléguez ce verbe qu’aux artistes, détrompez-vous. La créativité est inhérente à la vie elle-même. Nous sommes issus d’un élan créateur.

« Si vous n’avez rien à créer, créez-vous vous-mêmes. » Carl-Gustav Jung, Ma vie. Souvenirs, rêves et pensées

jeudi 29 juillet 2010

Des 100 jours et de la pub

Cent jours se sont écoulés, hier, depuis l’explosion de la plate-forme exploitée par BP au large de la Louisiane, qui a provoqué la pire marée noire de l’histoire des États-Unis. La militante écologiste Enid Sisskin a tenté à maintes reprises d’alerter l’opinion publique sur les dangers du forage pétrolier en haute mer, sans écho. Cette alerte a dû être qualifiée de simple inquiétude féminine, une fois de plus.

Tony Hayward, le patron du géant pétrolier britannique, a donné sa démission. Lui a-t-on dit que son air de désolation n’est absolument pas crédible?
Le langage non verbal crie qu’il s’agit d’un coup publicitaire, et qu’il fera un saut en avant dans quelque temps, notre mémoire de la tempête noire endormie.

De 397 à 715 millions de litres de pétrole se seraient déversé dans la mer entre l’explosion de la plate-forme Deepwater Horizon le 20 avril, et la pose de « l’entonnoir » sur la fuite, le 15 juillet. Quelque 1027 km de côtes ont été souillées. Des « boulettes » de pétrole poussées par des vents alimentés par l’ouragan Alex, ont été récoltées sur les plages du Mississipi. Plus de 2000 plages du golfe sont désormais à risque en matière de santé, fermées.

Le groupe pétrolier BP et les victimes de la marée noire se retrouveront pour la première fois devant la justice, aujourd’hui, à Boise, en Idaho, pour ce qu’on pourrait présumer être l’un des procès de la décennie. Du haut de leur 32, 2 milliards de dollars de profit, la compagnie aura de quoi rencontrer les frais judiciaires.

La planète, quant à elle, n’a pas les mêmes recours. Le pire dans tout ça, c’est que nous sommes tributaires de la publicité. Tout est pub. Notre cerveau demeure enclin – et dressé - à emmagasiner la beauté annoncée. Pensez à Maple Leaf. On a cru à la faillite suite au scandale de la listériose. La compagnie revient en force, à coup de pub « santé ». La mère, (bien sûr), nage dans la béate sécurité en offrant un sandwich au jambon Maple Leaf, Au naturel.

Un autre exemple. Francky Vincent, artiste de la Guadeloupe, a écrit et composé une chanson intitulée Tu veux. Aucun décollage. Niet. Jusqu’à ce que cette création soit rachetée par Universal Music France et devienne Tu veux mon zizi. Cette chanson coquine devient un « tabac ». Deux millions de ventes et de visionnement sur youtube. C’est ça, la pub.

On parie. Tony Hayward reviendra dans quelques années sauver la planète avec une voiture – ou tout autre véhicule non identifié — qui fonctionnera avec du pétrole tout neuf, au naturel, et nous aurons soudainement la conscience tranquille d’être aux premières loges du banc d’essai.

Tout est pub.

lundi 26 juillet 2010

Adeline et Éléonore, personnages d'été

Ce matin-là, la marée était basse. Dès que le soleil avait diffusé les premiers rayons, Éléonore et Roseline s’étaient réveillées, accueillant le jour avec fébrilité. C’était dimanche, journée de grâce matinée pour les parents. D’autant plus que grands-parents et amis étaient venus fêter le début des vacances d’été en s’installant à la maison. Un immense feu avait été dressé au bord du fleuve, sur la grève, la veille au soir, jusqu’à la nuit.


Ils s’étaient donc couchés tard, repus des festivités. Afin que les filles demeurent au lit plus longtemps, la mère des jumelles avait déposé de nouveaux livres d’histoires ainsi qu’un bol de fruits sur leur table de chevet. Le moment était parfait pour exécuter leur plan.

Éléonore et Roseline avaient imaginé depuis l’hiver de descendre la côte, seules, sans entendre les éternelles recommandations de règles de sécurité. Après tout, elles venaient de terminer leur première année, ce n’étaient plus des bébés de « maternelle ». Les adultes ont tellement de difficulté à comprendre que les enfants grandissent, se disaient-elles, en planifiant leur escapade.

En dessous de leur lit, hier soir, chacune avait préparé un sac à dos pour l’aventure : des céréales, des pommes, berlingots de lait, des tartines de confitures, un seau, une petite pelle de plastique ainsi qu’un contenant de crème glacée vide, pour les trésors à rapporter. De plus, pour faire vrai, Éléonore avait glissé les lunettes soleil de maman, et les nouveaux livres, comme dans tout bagage digne de ce nom.

Elles s’habillèrent silencieusement, et sortirent par l’arrière de la maison en refermant tout doucement la porte-moustiquaire, faisant chut à Galop pour qu’il ne jappe pas. Sa queue frétillait tellement fort qu’il fit tomber une plante sur le balcon arrière. Le souffle coupé, les filles se cachèrent dans le racoin, en statue, attendant quelques instants, jusqu’à être certaines que les parents soient encore enfouis dans le sommeil. Soulagées, elles avaient le champ libre. Tout en marchant pour se rendre à l’entrée du sentier qui descendait au fleuve, Éléonore demanda à Roseline, en faisant la moue, pourquoi ses souliers de toile devenaient tout mouillés alors qu’il n’y avait pas de pluie.

— Beurk, je déteste ça, elle dit en chialant.

— C’est la rosée, fut la réponse reçue avec un ton exaspéré. Si tu commences déjà à te plaindre, tu ne pourras pas me suivre. Retourne à la maison te mettre au lit comme un bébé.

— Je suis plus cool que tu le penses, et j’y vais moi aussi.

Elles descendirent donc la côte menant au fleuve, par le sentier escarpé défriché par les parents et le voisinage l’été précédent. Cette aventure leur donnait l’impression d’être dans un film. Galop passait devant, derrière, s’assurant que les filles se portaient bien. Une fois rendue sur la grève, une bouffée de fierté les fit sauter de joie. Elles étaient seules sur la plage.

— Bon, le sable est humide et il va falloir enlever les algues pour faire une jolie table. Est-ce qu’on a apporté une serviette? demande Éléonore, qui regretta sa question en voyant Roseline aménager leur déjeuner sur leur grosse roche.

C’était magique. Sans les parents, elles pourraient ramasser autant de têtards, les nourrir, et construire une maison pour les grenouilles. Elles collectionneraient plein de coquillages pour les peindre, décorer leur chambre et faire des colliers.


Elles s’installèrent sur leur rocher comme à la table d’un chef cinq étoiles. La première bouchée de céréales fut étonnante. Oh!, non, le lait est chaud, et dégueu…

— Ben voyons, Éléonore, fallait pas le laisser toute la nuit sous le lit. Ne mange pas ça. On va prendre les tartines de pain avec les pommes et les raisins que maman a préparé.

Le soleil réchauffait déjà le sable et ce serait facile de ramasser les algues pour la cueillette de coquillages. Les filles savouraient cette aventure, transportées par le bruit des vagues et cette sensation d’être au cœur du Monde.

Soudain, les feuilles d’arbres se mirent à frémir et cela les fit sursauter. Ce ne pouvait être le vent. Quelques cailloux dévalèrent dans la côte à quelques pas du sentier. La gorge nouée, sans mot ni son pouvant sortir de leur bouche soudainement sèche, Éléonore sauta de la roche et se précipita à l’eau pour s’éloigner de ces bruits étranges. Adeline, qui avait toujours joué le rôle de « grande sœur » auprès d’Éléonore, persuadée qu’elle détenait une maturité exemplaire, lui cria, affolée, de revenir immédiatement sur la grève.

Si vous êtes inspiré(e), il me ferait plaisir de recevoir vos idées & commentaires:
Quel est la source du bruit? Quelles aventures attendent les jumelles?

jeudi 22 juillet 2010

Aspirateur et twist

C’est une journée parsemée de rendez-vous, entendre aussi l’aspect « rallye » de voiture qui s'ajoute. Ce genre de quotidien me rend habituellement à cran, me sentant bousculée dans la quiétude qu’exige ma période d’écriture, et ce, dans un environnement rangé, net et chaleureux. Entendre que lorsque je manque de temps, on jurerait qu’une tornade a giclé dans ma maison. J’avais le choix : ou bien j’arborais mon enveloppe style Twilight, en voltigeant au-dessus des débris, yeux injectés de sang et déversant mon maléfique caractère de ménagère à boutte, ou bien je prenais d’emblée un thé afin d’y voir plus clair. Avec le regard étourdi que m’a projeté ma chatte, le choix s’imposait de lui-même.


Les vertus anti oxydantes du thé, enjolivées par la musique de harpe en fond sonore, j’ai refait une nouvelle planification de la journée. Ce qui m’importait, c’était le désir de marcher, de cuisiner, de ranger et de nettoyer. De bouger dans le plaisir. Pour une rare occasion, je délesterais mon temps d’écriture au profit du feng shui de ma chaumière. Avec les temps chaud et humide récents, une sensation collante et agglutinante s’est installée, et ma tolérance a atteint sa limite. De plus, j’ai des ados et leurs amis, en croissance accélérée – presque diabolique —, qui réclament de la bouffe à plein temps. J’ai choisi. Pour mieux me consacrer à ma passion par la suite.

J’ai carrément envie d’un twist, aspirateur en main. Exit la harpe.



mardi 20 juillet 2010

Petite et grande séduction

Je me suis réveillée avec des images du "Bas-du-fleuve", déjà vécues, et d’autres inspirées de photos ou de films, comme par exemple, La grande séduction. Charmée par les grandes étendues, j’avais déjà trouvé le titre de mon billet du matin. Une journée sous le thème de la séduction, petite ou grande. Et quoi de mieux pour nous séduire? Vous avez deviné qu’il s’agit de bouffe, bouquins et gourmandises.

On amorce la journée par l’écriture, dans notre journal, notre premier contact avec soi : les pages du matin,  selon l’approche de Julia Cameron. Déjà, on est branché sur la vie qui palpite à l’intérieur, ce qui facilite la prise de notre place dans le Monde. Au menu, j’ajoute une promenade dans un parc, un sentier en forêt, ou tout autre endroit qui éclabousse de la beauté dans nos yeux .

Au retour, un smoothie aux bleuets et amandes sera un fournisseur d'énergie hors pair. Voici une recette revue et corrigée, inspirée de la revue Châtelaine du mois d’août. Pour 2 personnes.

1 1/2 tasse de lait de riz, ou d’amandes
1/2 tasse de mangue
1/2 tasse de bleuets
1/2 tasse de fraises tranchées (ou plus ou moins du même fruit)
¼ tasse d’amandes tranchées
1 c. à soupe de sirop d'agave ou d’érable pur
1/2 c. à thé de cardamome (facultatif)

Mettez le tout au mélangeur et installez-vous dans votre endroit favori pour déguster.

Pour le lunch du dîner? Une salade de betteraves rôties– rouges et jaunes- rocquette ou autre laitue, noix de Grenoble légèrement rôties , miettes de chèvre frais (si désiré), huile d'olive & moutarde de Dijon & vinaigre balsamique blanc &  ciboulette fraîche. Cette recette est inspirée du chef Danny St Pierre (que j'ai osé retoucher, quel affront!)


Suggestions de bouquins inspirants :
  • Concerto à la mémoire d'un ange, Éric-Emmanuel Schimth, Albin-Michel, 2010
  • Victoria et les Staveney, Doris Lessing, Flammarion, 2010
  • Cherche auteur désespérément, Debra Ginsberg, Presse de la Cité, 2008
  • Mais que lit Stephen Harper, XYZ éditeur, 2009
Pour ma séduction de fin de journée, je souhaite savourer une salade tiède de truite-arc-en-ciel, aussi dénichée dans la revue Châtelaine du mois. Vous la trouverez sur le site. Pensez haricots verts, patates grelots, tomates cerises, à déposer sur la laitue, ainsi que le filet de poisson. Je salive déjà.

Ne pas oublier le rituel du thé, chaud ou froid, pendant l'après-midi.

Bonne séduction!

lundi 19 juillet 2010

Un sentier de pétales de roses

Ce week-end, des brèches se sont ouvertes sous le ciel de l’amour. On aurait dit un mélange gracieux d’ Éloge du mariage, de l’engagement et autres folies, avec Derniers fragments d’un long voyage. Deux des merveilleux livres de Christiane Singer qui m’ont habitée lors du mariage de Ingrid et Jean-Jacques ainsi qu’à la cérémonie des adieux de Gilberte, la mère de Ginette. Deux célébrations, deux moments charnières dans notre traversée sur la planète.


Il y avait de l’amplitude dans ces sentiments à ciel ouvert. Sous le décor champêtre du mariage, le couple a osé l’engagement, se promettant d’être ensemble dans les circonstances abyssales et de contribuer à l’expansion des trésors de l’autre. Des larmes de joie, d’amour et de tendresse ruisselaient sous les paroles musicales roses de Piaf. Les symboliques du nouveau départ à deux, fougueux en projets, ramènent à quelque chose d’essentiel dans notre humanité : être entouré, bercé, soutenu, aimé, les yeux lumineux.

Ce qu'on attend de l'être avec qui on vit, c'est qu'il vous maintienne au niveau le plus élevé de vous-même, a dit Virginia Woolf. C'est ce que se sont promis Ingrid et Jean-Jacques, sur un plateau magique de mignardises d'allégresse.

Marcher au bras de son prince et de sa princesse du cœur et de l’âme, en toute verticalité, est une aspiration ancestrale, et cela rend l’événement des plus festif. Construire et écrire une histoire d’amour, avec des plumes de liberté, d’extase et de rêves, tout cela en brillance, être repus de délices et de vin, pour ensuite prendre son envol. La vie, telle une odyssée.

Je suis privilégiée d’avoir vécu de si beaux moments, de si beaux entretiens, avec de si belles personnes.

Aux deux endroits, des pétales de roses éclairaient le sentier.

Aux deux endroits, des étincelles de bénédiction.

Aux deux endroits, le chapiteau est désormais vide.

Ils ont retrouvé ce matin leur nouvelle maison.

jeudi 15 juillet 2010

Don't Worry Be Happy!

Quand vient le moment de réaliser un projet ficelé dans le tiroir, cette chose qu'on a tant espéré, rêvé, caressé, il n'est pas rare que la peur s'emballe dans nos gestes et nos prises de décision. Inconsciemment ou non, on sabote, on recule, on discrédite ce dessein, et dix milles occasions entravent alors l'élan. Experts dans les détours, nous ressemblons aux routes du Québec chaussées de cônes oranges. Pas aujourd'hui, demain je m'y mettrai, est la phrase-clé du syndrome.

Nous savons pourtant. Tout notre être possède l'intelligence intuitive et primitive de cette connaissance, au fond de nos entrailles, nous dictant que par cette réalisation, nous aurons le privilège de contribuer au bien-être de l'Autre, car le geste créateur est propice à une énergie lumineuse et bienveillante. Ce mouvement irradie.

Vint un temps où le risque de rester à l'étroit dans un bourgeon
était plus douloureux que le risque d'éclore. Anaïs Nin

Le temps des excuses et des justifications est révolu. L'été venu, l'éclosion est réclamée. Aujourd'hui, je fais offrande au monde, tel un gage d'amour, d'un pas osé vers cette aspiration qui zèbre mon énergie. Je compose avec mes peurs, sachant qu'elles camouflent toujours des désirs, je les insère dans mon extracteur à jus pour en extraire le nectar de l'accomplissement. Je vous invite à la dégustation.
Be happy!

mardi 13 juillet 2010

Le dernier vol

 Au moment où j’écris ces quelques lignes, mon amie Ginette accompagne sa maman vers la grande destination, celle de l’au-delà. Cette traversée est laborieuse, douloureuse, désespérante, quoique vivante. L’annonce pour l’embarquement, lorsqu’il s’agit du dernier vol, nous enlace dans l’attachement, les souvenirs, la fin d’un livre où les histoires s’amalgament.


Cette peine qui éclabousse tout sur le passage du vivant exacerbe notre devenir. Être là, entièrement là, dans l’instant présent, avec un être cher qui quitte son enveloppe, n’arborera jamais autant de contenance, de puissance, que si l’on détient la force et la capacité de « porter » cette intensité. En laissant gicler tout cet amour, en le dévoilant avec la véracité des mots, on ne reviendra jamais identique dans notre espace terrestre. La Vie se couronnera nécessairement d’une autre couleur, d’une autre texture, d’une forme nouvelle.

On a beau aimer le monde où on habite, rendre les armes, malgré le frôlement d’un sombre ravin, trace le passage vers la splendeur divine. Nous ne sommes que des vivants qui voyagent entre les mondes. Ta mère foulera le sol d’un monde neuf.

Mon amie, que la paix et la grâce vous entourent, toi et ta maman. Tu l’as guidée et escortée pour l’embarquement du dernier vol, sois assurée que ton père et les anges l’accueilleront lors du débarquement vers la Lumière. Le Ciel lui sourit.

Avec tout mon amour, je suis à tes côtés.

lundi 12 juillet 2010

Des fraises et des bleuets

Je suis allée chez mes parents, ce week-end, à Deschaillons-sur-St-Laurent. La brise habituelle provenant du fleuve s’est déclarée au repos. Que du soleil, que de la chaleur, que de la chaleur. Celle qu’on vénère, tout au long de l’année, dans notre pays mal isolé. Un climat de bord de mer qui nous ferait perpétrer un détournement de fonds pour y avoir accès, de novembre à mars. Depuis quelques semaines, cette température s’immisce dans chacune de nos cellules, moites il va sans dire, et nous invite à ralentir la cadence. Car gigoter par des temps pareils, c’est vivre dans un sauna à ciel ouvert. L’occasion existe bel et bien pour nous convier à briser la cadence, à effectuer des réserves, à emmagasiner de l’énergie solaire. Entre vous et moi, les chialeux de juillet, ceux qui carburent aux statistiques affolantes, seront les premiers à grogner la bise venue.


J’ai fait une provision de fraises et de bleuets de cette belle campagne. Seize litres de l’une et quatre de l’autre. Inutile de vous annoncer la frénésie culinaire magistrale dans la maison. Les fruits triomphent en promo sur toutes les surfaces de la cuisine : à croquer, à presser en jus, à congeler, à introduire dans les pains ou les salades. La créativité à son meilleur. Le thème est : déguster, profiter, savourer, s’arrêter. Comme si c’était la dernière fois qu’on ingurgitait ce nectar. Adopter la posture shavasana en yoga, celle qui nous fait intégrer tout le travail accompli.
Une position philosophique du repos.

Cette mort qui nous remet en vie.

À s’offrir :

Les jus santé, de Colombe Plante, naturopathe, AdA

Modus Cuisine, Jus et jus énergisants, Judith Millidge, Modus Vivandi

L’art de la simplicité, Dominique Loreau, Laffont, 2005. Toujours et encore plus d’actualité, adoptons la philosophie zen du dépouillement, afin que l’envie nous prenne d’imiter l’auteure et de faire le vide de nos armoires, de nos salons, de nos agendas et même dans l'agitation de nos têtes.

vendredi 9 juillet 2010

Coral reef & stingray safari

Un bruit de tremblement de terre m’a éveillée de mon coma nocturne. J’ai fait l’hypothèse que la planète m’offrait un remake de l’événement sismique produit lorsque j’étais en vacances. Mais non. La Terre a tremblé sous la puissance des branches d’arbres atterrissant au sol, chez mon voisin, lorsque sciées par les émondeurs déversant leur testostérone à plein régime. Un monstre, carrément. L’arbre, pas le voisin. Ses branches enveloppaient notre toit jusqu’à battre de l’aile à chaque vent venu. Nous étions persuadés que des êtres inconnus habitaient alors dans le grenier.


Bref, lorsque mes pieds ont foulé le sol, au sortir du lit, j’étais dans les limbes bleus des vacances. Du marteau, de l’enclume ou de la trompe d’Eustache, je ne saurais citer la partie de mon labyrinthe de l’oreille qui n’est pas tout à fait revenue de la mer des Caraïbes. Mais une parcelle de moi est restée là-bas. À Grand Caïman, par exemple. Donc, à l’aube, m’est revenue en mémoire notre aventure.

Partons du fait que je suis peu douée en matière de communication anglaise. C’est un drame dans ma vie, mais ce fait serait le sujet d’un autre billet. Donc, pendant la croisière, je réserve une expédition pour explorer les coraux, lors de notre passage à Grand Caïman. Je ne comprenais à peu près rien à ce que m’expliquait le préposé aux « descriptions tours », — parlant à la vitesse de l’éclair —, mais à un certain moment, j’ai saisi l’essentiel : coral reff. J’ai balancé ma « see pass » afin de clore ce martyr et annoncer aux enfants la surprise. Enfin, avec tout l’équipement requis, nous pourrions nous immiscer dans la mer et ses multicolores coraux. Ce qui manquait à mon vocabulaire était la fin de la description de cette expédition : coral ref & stingray safari. Les coraux et les safaris, jusque-là, tout annonçait la féérie. C’est lorsque nous sommes arrivés en plein milieu de cette étendue bleue, à perte de vue, que mon fils William a demandé, naïvement, ce qu’étaient les grosses masses noires :
- des roches? Oh!, elles bougent…


J’ai appris, par la force des choses, que le safari en question consistait à nager avec des raies. Dans l’eau jusqu’à la taille, elles se frôlaient à nous, nous défiant du regard. Dessus gélatineux (beurk), mais le dessous douçâtre. Avec cette impression fibreuse de nous retrouver dans une épave de bêtes féroces, d’après les épopées historiques racontées. « Enfin, des vacances d’aventures! », aurait dit Laurent, lorsqu’il avait six ans. Michel aurait répondu qu’à mes côtés, on ne sait jamais dans quoi on s’embarque.

Finalement, les enfants ont adoré le challenge, et j’ai apprivoisé les bêtes. Rien de comparable à mon contact divin avec les dauphins, mais tout de même. Nous avons élargi notre expérience et les coraux n’ont été que plus sublimes par la suite. Main dans la main avec mon fils, nous promenant dans le jaune et le violet des trésors de la mer, jamais je n’oublierai.

jeudi 8 juillet 2010

Jouer

J’ai lu mon horoscope au petit déjeuner. Concernant les sagittaires, voici ce qui ce tramait dans les astres:


« Vous aimerez la tranquillité, en particulier chez vous. Vous prendrez le temps de méditer sur quelques histoires, dont une qui a eu lieu il y a bien longtemps. Vous la verrez peut-être autrement. Avec moins d’amertume. Il était temps. Vous pourriez aussi faire des changements amusants à la maison ».

Comme changements amusants, j’ai songé justement à évacuer la maison et ses habitants, rêvant d’un espace clos, silencieux, afin de goûter à ce qu’on appelle la tranquillité. J’aime les grandes tablées, les bombes dans la piscine, les morceaux de melon d’eau parsemant le trottoir pour s’y rendre. J’adore fouiller frénétiquement les sites de recettes « fraîches » pour cuisiner à tous ces homards à deux pattes qui s’agrippent à la cour. J'adore le service de téléphonie haut de gamme qui permet à mes enfants de l'occuper à plein temps. Mais arrive un instant où le manque de liquide à lessive rappelle qu’une vie de moinesse a une certaine volupté. Pour ce qui est de la méditation, à moins qu’elle soit aquatique, elle est désirée comme une climatisation sous 41 degrés.

Déçue de ne pas répondre aux attentes de mon horoscope, je me suis rabattue sur un jeu de cartes des oracles des anges de Doreen Virtue. J’ai pigé la carte JOUER.

« Cher bien-aimé, il est temps de mettre de côté votre travail pour l’instant. N’ayez crainte : nous veillons sur vos responsabilités. La joie, le jeu et le rire sont vos alliés. Cela vous redonnera l’énergie nécessaire pour reprendre le travail ensuite et voir les choses d’un nouvel œil. »

Je ne sais si les anges, mais le livre Modus Cuisine salades m’est tombée dessus à la page 70. J’avais exactement tous les ingrédients pour accomplir cette mission de cuisinière, dans un élan presque festif, de pâtes au cari – tiède - . Plus de 70 recettes estivales, de Louise Rivard, à intégrer dans la trousse de secours des périodes de canicule. Je ne sais si les anges passeront l'aspirateur et assumeront quelques tâches, mais le repas sera un succès.

Je mets donc un « hold » sur la planification de mon atelier d’écriture, de ma retraite pour la rédaction de mon récit de vacances, de mon programme cardio capteur d’amas graisseux, et j’imite les poulpes qui changent de forme selon la situation : en ce jour béni, je vais jouer à la sirène. Jouer bleu. Et demain je me promets de prendre un thé avec mes amis.

mardi 6 juillet 2010

La vie, la vie

Ce matin, c'est la canicule comme je l'ai chéri pendant tout l'hiver, dans mes rêves diurnes et nocturnes: installée auprès d'un plan d'eau, mer ou piscine, auprès de mes amours, sorbets aux petits fruits laissant quelques traces près d'un bon bouquin. Je devrais jubiler. Pourtant, j'ai le don d'anxiété qui provoque l'oscillation entre la permission de vivre ces instants, et les neurones qui galopent sur une piste de course de questionnent à savoir si tout cela est juste

Devrais-je être ailleurs, dans une mission plus honorable? Comment n'ai-je pas inventé une façon de colmater la brèche dans le Golf du Mexique, d'éradiquer la malaria, le syndrome de la Tourette? Sainte Rita, priez pour moi et tous les anxieux de la performance. 

Marguerite Yourcenar disait: on ne change pas, on s'approfondit. Maintenant, je suis plus lucide au regard de mon don, quoique pas plus confortable. Les explications permettent de comprendre ce que nous avons raté, en compagnie de ce petit démon du « ce n'est jamais assez», mais ne réparent rien des moments volés à la vie qui ne demandait qu'à prendre forme, qu'à être. Si je canalisais toute cette fougue en demeurant, là, en toute verticalité, ce serait un moment béni de repos.

Il n'est rien de la vie que je veuille laisser passer auprès de moi sans le saisir. 
Simone de Beauvoir

Alors aujourd'hui, je me mouillerai de chaleur et de baignade, de jus de légumes et fruits frais pressés, en noyant la culpabilité d'être autant privilégiée. Après tout, mère Teresa a dit: la vie est une chance, saisis-là. Je profiterai donc de ce que la vie m'offre, et cela prendra la forme d'une grande tablée d'enfants et d'amis, goulûment installée autour d'un barbecue et de la piscine, partageant les souvenirs de vacances. Et je redoublerai de patience en attendant mon ordinateur au coeur neuf!


dimanche 4 juillet 2010

Le retour

Je suis de retour. J'ai amassé plus de souvenirs que pourrait contenir un florilège d'albums. Désormais, mon cerveau est un virtuose du «bleu»: bleu azur, turquoise, bleu ciel, bleu de pervenche, bleu de Prusse. Tous ces bleus et leur effet guérisseur. 

J'ai trôné sur l'estrade du bonheur familial. Pas d'affrontements, pas de conflits, pas de rallye de transport, rien qui ne put briser le charme. Un voyage de grâce, parsemé de paysages où règnent l'intelligence, le goût, l'élévation. À travers la brume tropicale, accoudée à la rambarde sur le pont du bateau, j'ai admiré le soleil et l'écume des flots, jusqu'à abandonner toute inquiétude, malaise, doute. J'ai baigné dans cette mer riche, pure, salée, fougueuse de ses coraux, ses poissons multicolores, ses raies, où seuls les verbes admirer, ravir, apprécier et envelopper participaient à la syntaxe. 

Encore sur les nageoires des dauphins, dans un état oscillant entre le céleste et le divin, j'ai pétri cette sensation unique jusqu'à l'inscrire dans mes cellules pour l'éternité. 

Difficile de revenir à une autre réalité, appelée le quotidien. Je souhaiterais demeurée immergée de cette luminosité, mais aujourd'hui, au moment où j'écris ces lignes, mon ordinateur m'a abandonnée, et je me retrouve cadenassée sans mon rituel d'écriture. Mon disque dur a accosté au port. Il a eu la gentillesse de me signaler une tempête à venir, de sorte que mes données ont été épargnées. Dieu soit loué. Mon ordinateur au coeur neuf s'alanguira sur ma table de travail dans le milieu de la semaine. Peut-être tout cela est-il la symbolique de la nouveauté, de la transformation, du guet au regard de l'usure. Peut-être aussi un signe de prendre du temps, de préserver et emmagasiner un peu de cette énergie foudroyante qu'apporte la mer des Caraïbes. 

Toujours est-il que je vous écris d'un autre ordinateur, avec tous les risques d'erreurs inimaginables, et qu'il faudra composer avec cela. Mes récits devront attendre, mais je garde le contact. Heureuse d'être là, tout simplement.